Luxembourg, une place de choix pour le private equity

15/06/2022

Guillaume Roch, Head of Business Development au sein de Société Générale Securities Services (SGSS), évoque la croissance de l’activité private equity au Luxembourg et dresse les défis qui attendent le secteur pour l’avenir.

Quels sont les défis auxquels le secteur est confronté ?

Le Luxembourg se présente comme une place incontournable pour la domiciliation des fonds private equity.

Guillaume Roch explique :

Avec son environnement économique et juridique stable, soutenu par une proximité entre le régulateur et le business, la place est parvenue à attirer les principaux acteurs du private equity.

Au niveau de l’industrie des fonds de private equity, le pays est le domicile qui connait la progression la plus importante sur ces cinq dernières années en comparaison à l’ensemble des domiciles au niveau international (Chine exceptée)1. Le Luxembourg est donc de plus en plus vu comme une place de choix pour gérer ce type d’investissements.

Un potentiel de développement important

Cette tendance pourrait d’ailleurs se renforcer, si l’on en croit l’expert :

En effet, au niveau mondial, le private equity représente 60 % des classes d’actifs alternatifs. Selon les analyses menées, le private equity ne représenterait que 25 % des actifs alternatifs gérés depuis un véhicule luxembourgeois, poursuit-il. On peut voir là un fort potentiel de croissance. Le private equity dans les fonds luxembourgeois pourrait ainsi doubler ou tripler dans les toutes prochaines années.

Dans un contexte économique global incertain, les acteurs du private equity doivent considérer de nouveaux risques au même titre que des opportunités à saisir.

Appréhender la hausse des taux

L’un des changements importants, actuellement, a trait à l’augmentation des taux d’intérêt.

Guillaume Roch explique :

Nous sortons d’une période où les taux étaient historiquement bas. A l’avenir, le cash devrait être moins facilement accessible, ce qui pourrait inciter les investisseurs à être plus sélectifs dans leurs choix.

Dans ce contexte, ils devront aussi recourir davantage à des solutions de financement relais, comme en propose Société Générale.

D’autre part, l’augmentation des taux d’intérêt vont dans une certaine mesure concurrencer les rendements, poursuit-il. Pour répondre aux attentes des investisseurs, les gestionnaires de fonds private equity vont très certainement chercher à réaliser des économies d’échelle, en simplifiant leurs processus et leurs approches. La dynamique de professionnalisation de l’activité, qui s’opère notamment au départ de Luxembourg, devrait donc encore s’accélérer.

Le défi de l’ESG

Une autre grande tendance, qui devrait avoir un impact considérable sur l’activité private equity, a trait à l’évolution de la réglementation et des attentes des investisseurs par rapport aux enjeux environnementaux, sociaux et de gouvernance.

Guillaume Roch explique :

Ces évolutions pourraient considérablement bousculer l’activité du private equity.

Il est crucial d’accompagner le changement, avec de nombreux défis à relever, notamment pour mesurer les performances environnementales, sociales ou de bonne gouvernance des actifs investis. Déterminer les critères d’évaluation pertinents, collecter la donnée fiable, la vérifier… C’est extrêmement complexe, d’autant plus si l’on parle de private equity, autrement dit d’acteurs en plein développement, qui n’ont pas la maturité de sociétés cotées.

Une fois de plus pour relever ces défis les acteurs du private equity seront contraints de rechercher des synergies avec de grands acteurs.

Au-devant d’un public plus large

A côté de cela, les gestionnaires de fonds private equity souhaitent aussi démocratiser l’accès à leurs produits, dans l’optique de lever davantage de capital.

Guillaume Roch explique :

Pour parvenir à s’adresser à une clientèle davantage « retail », les acteurs vont devoir se transformer, au départ des possibilités offertes par le numérique, comme la technologie des registres distribués, standardiser l’administration.

L’enjeu n’est pas de toucher tout investisseur, mais sans doute de pouvoir aborder plus facilement une clientèle privée, bénéficiant de services de gestion patrimoniale.

Attirer les talents

Le private equity au Luxembourg, s’il veut rester compétitif, doit aussi relever d’autres challenges particuliers.

Guillaume Roch précise :

D’une part, il y a un besoin important en compétences. Le Luxembourg est un petit marché. Il est essentiel, dès lors, de pouvoir attirer des talents venant de l’étranger et d’investir dans la formation localement.

C’est un enjeu collectif qu’il faut pouvoir appréhender rapidement et efficacement. A terme, le contexte de pénurie de compétences, entrainant une hausse des coûts salariaux, pourrait peser sur la compétitivité des acteurs de la place.

Faciliter l’établissement de nouveaux véhicules

Un autre défi, identifié par Guillaume Roch, a trait à la difficulté que peuvent rencontrer certains acteurs du private equity à, simplement, ouvrir un compte bancaire au Luxembourg :

Pour de bonnes raisons, les banques sont soumises à une réglementation contraignante, qui augmente de manière très importante les coûts de gestions de ces comptes cash. Considérant ces enjeux, et le faible niveau de revenus générés par la mise à disposition d’un simple compte bancaire, il risque de devenir très difficile pour un fonds de private equity de ne pas sous-traiter l’ensemble de l’activité à un unique prestataire.

Trouver des solutions adaptées

Malgré quelques risques, nous faisons donc face à une formidable croissance du marché des fonds private equity au Luxembourg.

Guillaume Roch poursuit :

Il y a lieu, en tant qu’institution bancaire, de mettre en œuvre des solutions adaptées pour soutenir les acteurs du private equity, poursuit le Head of Business Development de SGSS.

L’activité pourrait connaître une croissance à deux chiffres durant les 5 prochaines années. Il y a de belles opportunités liées au développement du private equity. A nous, acteurs de la place, d’être en mesure d’accompagner cette croissance et de la renforcer en faisant preuve d’agilité et de pragmatisme. De cette manière, nous serons à même de veiller à maintenir la compétitivité du Luxembourg dans le private equity.

1Données Preqin à fin 2021

Article publié dans Lux Times en juin 2022.

Guillaume Roch, Head of Business Development, Société Générale Securities Services (SGSS)